Médecins pratiquant au Québec : comment exercer en société ?

4 novembre 2019

Par Me Pascal Lepage, associé et Me Valérie Lachance, avocate

Depuis l’entrée en vigueur du Règlement sur l’exercice de la profession médicale en société (le « Règlement ») le 22 mars 2007, tout médecin inscrit au tableau de l’Ordre des médecins du Québec (l’« Ordre ») peut, à condition de se conformer aux modalités et restrictions établies par le Règlement, exercer ses activités professionnelles par le biais d’une société par actions (« SPA ») ou d’une société en nom collectif à responsabilité limitée (« SENCRL »). Évidemment, tout médecin exerçant en société demeure assujetti aux obligations déontologiques prévues au Code de déontologie des médecins et, à défaut de les respecter, pourra se voir retirer l’autorisation octroyée par l’Ordre d’exercer sa profession, qu’il l’exerce en société ou non. De fait, après avoir effectué son incorporation auprès du Registraire des entreprises du Québec (« REQ ») (ou auprès de Corporations Canada) et après avoir obtenu un numéro d’entreprise du Québec (« NEQ »), le médecin doit envoyer une demande d’autorisation à l’Ordre, laquelle sera accordée ou refusée à l’issue des étapes décrites sommairement ci-dessous.

Étape 1 – Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société

Le médecin qui désire exercer en société devra remplir la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société. Les déclarations contenues dans ce document devront être véridiques et conformes aux statuts constitutifs joints au certificat de constitution de la SPA ou au contrat constituant la SENCRL.

Étape 2 – Confirmation écrite de l’existence de la société

Le médecin devra joindre à sa demande d’autorisation une copie du certificat de constitution (SPA) ou un certificat d’attestation (SENCRL) de la société nouvellement constituée.

Étape 3 – Assurance excédentaire

Le médecin devra ensuite aviser son assureur de son intention d’exercer sa profession en société. L’assureur lui fera parvenir une attestation à l’effet que la société fait l’objet d’une garantie de responsabilité professionnelle conformément à la section III du Règlement. De fait, tout médecin exerçant sa profession au sein d’une société doit, pour être autorisé à pratiquer de cette façon, « fournir et maintenir pour cette société, soit par contrat d’assurance ou de cautionnement, soit par l’adhésion à une assurance collective contractée par [l’Ordre], soit par la souscription à un fonds d’assurance de la responsabilité professionnelle établi conformément à l’article 86.1 du Code des professions (chapitre C-26), une garantie contre la responsabilité que cette société peut encourir en raison des fautes ou négligences commises par les médecins dans l’exercice de leur profession au sein de cette société » (article 11 du Règlement). Mentionnons également qu’en vertu de l’article 14 du Règlement, l’obligation de maintenir une telle garantie ne s’applique pas si la société est éligible à l’assistance offerte par l’Association canadienne de protection médicale (l’« ACPM »).

Étape 4 – Frais

Des frais de 300 $ seront exigibles lors du dépôt de la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société. Si plusieurs médecins sont compris dans la société faisant l’objet de la demande d’autorisation à l’Ordre, chaque médecin devra débourser cette somme.

Étape 5 – Transmission des documents à l’Ordre

Finalement, le médecin devra transmettre à l’Ordre les documents ci-haut décrits, à savoir la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société dûment complétée et signée, une confirmation de l’existence de la société, une confirmation attestant de l’assurance excédentaire, le cas échéant, et un chèque à l’ordre de l’Ordre couvrant les droits prescrits afférents à la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société.

Sur réception de ces documents, l’Ordre déterminera si le médecin se conforme aux exigences du Règlement. Une confirmation écrite de l’Ordre et adressée aux médecins visés par la Déclaration afin d’être autorisé à exercer la profession médicale en société suivra dans les semaines suivant l’envoi de la demande.

EXERCICE DE LA PROFESSION EN SOCIÉTÉ

Tel que mentionné précédemment, le médecin devra se conformer aux modalités et restrictions prévues au Règlement afin de bénéficier du droit de pratiquer au sein d’une SPA ou d’une SENCRL.

Conformément aux dispositions du paragraphe 1(1) du Règlement, la totalité des droits de vote rattachés aux actions ou aux parts sociales devra en tout temps être détenue :

  • soit par au moins un médecin;
  • soit par une personne morale, une fiducie ou une entreprise dont les droits de vote sont détenus en totalité par au moins un médecin;
  • soit par une fiducie dont au moins 50 % des droits de vote est détenu par au moins un médecin et au plus 50 % par un seul des professionnels énumérés à l’alinéa 1(1)c) du Règlement, à savoir un administrateur agréé, un avocat, un comptable professionnel agréé ou un notaire; ou
  • soit à la fois par des personnes, fiducies ou entreprises énumérées ci-dessus.

Également, en plus des personnes mentionnées au paragraphe 1(1) du Règlement, les seules personnes ou entreprises pouvant détenir des actions ou des parts sociales, selon le cas, de la société (votantes ou non votantes) sont :

  • des médecins;
  • le conjoint, des parents ou alliés d’un médecin détenant des droits de vote;
  • des personnes morales, fiducies ou autres entreprises dont les droits de vote sont détenus en totalité par des médecins ou par le conjoint, des parents ou alliés d’un médecin détenant des droits de vote;
  • une fiducie dont au moins 50 % des droits de vote est détenu par des médecins ou le conjoint, des parents ou alliés d’un médecin détenant des droits de vote et au plus 50 % par un seul des professionnels énumérés à l’alinéa 1(2)d) du Règlement, à savoir un administrateur agréé, un avocat, un comptable professionnel agréé ou un notaire; ou
  • soit à la fois par des personnes, fiducies ou entreprises énumérées ci-dessus.

Les statuts constitutifs de la SPA ou le contrat constituant la SENCRL devront nommément inclure ces restrictions et une mention à l’effet que la SPA ou la SENCRL est constituée aux fins d’exercer des activités professionnelles devra y figurer.

Pour ce qui est des membres du conseil d’administration de la SPA ainsi que des associés ou des administrateurs nommés par les associés de la SENCRL, ils devront exclusivement être des médecins inscrits au tableau de l’Ordre.

Conclusion

L’incorporation professionnelle comporte des avantages et des inconvénients, selon la situation personnelle de chacun. L’âge, les perspectives de carrière et la situation familiale peuvent avoir un impact sur la pertinence d’exercer sa profession en société.

Il est d’ailleurs fortement recommandé de consulter vos conseillers légaux et fiscaux afin d’élaborer les stratégies fiscales propres à votre situation et vos besoins, lesquelles permettront de maximiser les avantages de l’incorporation professionnelle.

Pour toute question additionnelle relative à l’incorporation des médecins au Québec, n’hésitez pas à communiquer avec les auteurs ou votre conseiller légal en droit corporatif.

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