L’INTERRUPTION DES AFFAIRES PARTIE 2: LA COUVERTURE D’ASSURANCE DE L’INTERDICTION D’ACCÈS PAR LES AUTORITÉS CIVILES ET AUTRES PRODUITS SPÉCIALISÉS

20 avril 2020

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Considérant les décrets pris par le gouvernement provincial au cours des dernières semaines exigeant la cessation des activités des entreprises québécoises, à l’exception de celles incluses dans la liste de services essentiels ou prioritaires, plusieurs entreprises subissant ou anticipant d’importantes pertes de profits s’interrogent quant aux indemnités qu’elles pourraient recevoir de leur assureur.

Nous avons déjà traité dans un précédent billet de la couverture d’assurance potentielle pour interruption des affaires, en fonction des clauses de base le plus souvent rencontrées dans les contrats d’assurance commerciale.

Le  tournoi Wimbledon, l’événement mondial majeur du tennis qui a été annulé en raison de la pandémie, a récemment fait les manchettes puisque l’organisation disposait d’une couverture d’assurance qualifiée de «pandemic insurance coverage».

Il existe en effet des produits spécialisés sur le marché pouvant couvrir certains risques liés ou découlant de la COVID-19 et leurs conséquences sur les entreprises. Ces protections sont souvent offertes par voie d’avenants (endorsements), lesquels entraînent des extensions de la garantie dite de base ou une couverture complète pour ce qui est normalement exclu ou non visé par les contrats usuels. Dans certains cas, on peut parler de risques spéciaux ou sous-standards.

Au moment de vérifier si elle dispose de l’une de ces protections additionnelles ou spécifiques, comme les produits possiblement pertinents peuvent porter différentes appellations, une entreprise devrait notamment rechercher les termes suivants :

  • Declaration of emergency endorsement
  • Pandemic event endorsement
  • Couvertures diverses pour maladies infectieuses (Infectious diseases ou Named diseases)
  • Interruption by civil or military authority
  • Interdiction d’accès par les autorités civiles
  • Interruption d’activités
  • Perturbation de la chaîne d’approvisionnement
  • Time element ou Contingent time element coverage extension, etc.

Cette liste n’est évidemment pas exhaustive et le fait qu’une entreprise dispose de l’un ou l’autre de ces produits ne signifie pas que ses pertes de profits découlant de la pandémie seront couvertes. Chaque entreprise devrait tout de même faire la vérification du contenu de sa ou ses polices d’assurance. Un courtier d’assurance ou un avocat pourront vous aider à déterminer si vos protections d’assurance sont applicables, en l’espèce. Le libellé de chaque contrat d’assurance doit être examiné au cas par cas, incluant les différents avenants et autres extensions de garantie, afin d’évaluer la recevabilité de la réclamation d’une entreprise pour interruption des affaires.

Ces produits sont optionnels, et, dans certains cas, ne sont pas offerts par tous les assureurs. Comme ils accordent un niveau de protection plus élevé et visent souvent des risques d’importance, les primes sont établies en conséquence et il est probable que peu d’entreprises aient décidé de se prévaloir de telles protections étant donné le coût qui y est associé. La crise pourrait avoir pour effet de stimuler l’engouement pour l’obtention de tels produits lorsque la situation reviendra à la normale.

L’interdiction d’accès par les autorités civiles

L’interdiction d’accès par les autorités civiles ou Interruption by civil or military authority nous semble être l’une des extensions spécifiques les plus répandues et susceptibles d’être invoquées par les entreprises assurées en cette période trouble de pandémie.

Cette extension de garantie est fréquemment libellée de la manière suivante :

«La garantie s’étend aux pertes effectivement subies pendant toute période, à concurrence de 2 semaines, au cours de laquelle l’accès aux lieux est interdit par les autorités civiles, en raison directe d’un sinistre couvert ayant atteint des lieux avoisinants1

Tout comme la couverture générale de l’interruption des affaires, celle visant les pertes découlant de l’interdiction d’accès par les autorités civile est en général assortie d’une condition relative à la survenance d’un sinistre couvert ayant atteint les lieux avoisinant. On peut aisément imaginer l’exemple de l’entreprise ne pouvant accéder aux lieux assurés en raison de l’incendie de l’immeuble commercial voisin, comportant un risque important d’explosion sur une période plus ou moins prolongée.

Dans le cas qui nous occupe, la déclaration d’état d’urgence sanitaire actuellement en vigueur découle d’un décret. Nous doutons donc que la condition nécessitant l’existence d’un sinistre affectant les lieux avoisinants puisse être considérée comme remplie dans le cas de la pandémie actuelle. Encore une fois, il convient cependant de référer au texte précis du contrat d’assurance souscrit par un assuré donné, afin de se prononcer sur la possibilité de couverture. Il est possible que le libellé de certaines polices soit moins restrictif.

La jurisprudence en la matière peut également être appelée à évoluer. Il y aura donc lieu de surveiller attentivement la position que prendront les tribunaux sur ces questions. Tout comme la crise du verglas, la pandémie de la COVID-19 donnera vraisemblablement lieu à de nombreuses décisions qui dicteront l’interprétation des contrats d’assurance et influencera assurément l’évaluation des risques par les assureurs et possiblement la rédaction des contrats.

Pour toutes questions relativement à la couverture d’assurance pour interruption des affaires, adressez-vous aux membres de notre équipe en droit des assurances ici ou encore, aux auteures du présent billet :

Me Jessica Gauthier                                                           Me Carolane Gélinas
Associée                                                                                       Avocate
Jessica.gauthier@steinmonast.ca                                        carolane.gelinas@steinmonast.ca
418 640-4434                                                                              418 640-4415


1 9169-2327 Québec inc. c. Compagnie d’assurances ING du Canada, 2009 QCCS 3922 (CanLII) au par. 8, Option Consommateurs et al. c. Union Canadienne et al., 2005 CanLII 42425 (QCCS) aux par. 53, 67 et 62, Société en commandite stationnement de Montréal c. Cie. Canadienne d’assurances générales Lombard, 2003 CanLII 26540 (QC CS), au par. 44 et SPG International inc. c. Compagnie canadienne d’assurances générales Lombard, 2000 CanLII 19113 (QC CS) au par. 18.

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