Considérant la situation économique actuelle, il semble que la demande reliée à l’assurance-crédit soit appelée à connaître une hausse inévitable, que ce soit en matière de souscription de nouveau risque ou de demande d’indemnités par les assurés.
Le contrat d’assurance-crédit a été récemment décrit par la Cour d’appel, dans l’affaire Euler1, comme étant une «forme de protection que les prêteurs utilisent afin de se garantir contre les mauvais payeurs».
En vertu du contrat d’assurance, Euler s’engageait à assurer les comptes à recevoir d’Anderson, en cas de défaut de paiement de ses clients. Chaque client devait être approuvé au préalable par l’assureur, après une vérification de sa solvabilité au moment de souscrire le risque.
La cliente d’Anderson concernée par la réclamation, Foxx, a été refusée à deux reprises par l’assureur, en avril 2006 et en avril 2007, dans un premier temps parce que les informations concernant cette nouvelle entreprise étaient insuffisantes et, par la suite, en raison de problèmes de paiement déjà rencontrés avec Foxx.
Afin de contourner cette problématique, Anderson a obtenu un cautionnement de la part de CUB, une entreprise liée à Foxx. La situation financière de CUB respectant ses critères, Euler a accepté de couvrir Anderson pour les comptes à recevoir de CUB et même d’augmenter le montant de la couverture.
Plusieurs mois plus tard, une entente a été prise afin que CUB, qui connaissait elle-même des difficultés financières, acquiert l’inventaire commandé par Foxx, bien qu’elle n’ait ni les moyens, ni l’intention de le faire. Des bons de commande et de livraison au nom de CUB ont été confectionnés par Anderson. Il aurait été convenu qu’aucune somme ne soit réellement réclamée à CUB par Anderson, malgré le défaut de paiement, l’objectif étant dans les faits de pouvoir bénéficier de la couverture d’assurance émise par Euler.
La Cour conclut en ces termes : « le bon de commande de CUB sur lequel l’intimée [Anderson] fondait sa réclamation n’était qu’un moyen détourné de réclamer une indemnité d’assurance à l’égard d’une créance due par une cliente que l’appelante avait refusé de couvrir.» Euler n’a évidemment pas été condamnée à versé l’indemnité d’assurance réclamée par Anderson.
Dans la situation actuelle liée à la Covid-19, il est possible que plusieurs entreprises souhaitent se tourner vers l’assurance-crédit afin de se protéger de l’insolvabilité éventuelle de leurs clients. Les assureurs-crédit feront les vérifications requises avant d’accepter un client et seront vraisemblablement plus prudents, étant donné les difficultés financières actuelles et à prévoir pour plusieurs entreprises par les temps qui courent.
Il est important pour les entreprises désirant bénéficier de la protection de fournir l’information juste à l’assureur, tant au moment de la souscription du risque que lors de la présentation de la réclamation, au risque de se retrouver dans la situation d’Anderson et de se voir refuser la couverture d’assurance. Évidemment, tout stratagème du type de celui décrit dans l’affaire Euler est à proscrire.
Il est important de garder en tête qu’un contrat d’assurance en général vise à couvrir un risque qui ne s’est pas encore matérialisé. Il serait donc judicieux d’éviter d’attendre que la situation financière d’un client se soit détériorée, avant d’entreprendre les démarches liées à l’obtention d’un contrat d’assurance-crédit.
Pour des questions en matière d’assurance-crédit, adressez-vous aux membres de notre équipe en droit des assurances ici ou encore à l’auteure du présent billet :
Me Jessica Gauthier, Associée
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1 Euler Hermes Canada c. Groupe Anderson inc. 2019 QCCA 1009.