Le 12 mai 2020, le premier ministre québécois M. François Legault se présente à la conférence de presse quotidienne en portant le masque. L’image est forte. Elle l’est d’autant plus considérant que le port du masque ne fait pas partie des habitudes des Québécois. Il annonce alors que le port du masque n’est pas obligatoire, mais sera fortement recommandé dans certaines circonstances. En termes juridiques, cela signifie que les Québécois ne sont toujours pas obligés par la loi à porter le masque. Néanmoins, le gouvernement recommande désormais fortement de le porter quand la distanciation de deux (2) mètres dans un lieu public n’est pas possible, notamment dans les transports en commun et dans certains commerces.
Pourquoi le gouvernement n’a-t-il tout simplement pas obligé les Québécois à porter un masque dans un lieu public, comme plusieurs pays ou villes l’ont déjà fait? En effet, la Loi sur la santé publique1 permet au gouvernement d’obliger le port du masque en situation « d’état d’urgence ». Plus précisément, c’est l’article 123 de la Loi sur la santé publique qui prévoit qu’au cours d’un état d’urgence sanitaire, le gouvernement peut sans délai et sans formalité, ordonner toute mesure nécessaire afin de protéger la santé de la population, ce qui pourrait être le cas pour le port du masque.
La position du gouvernement québécois a été claire depuis le début de la pandémie : il n’imposera pas le port du masque, considérant qu’il existe des alternatives, et que l’imposition d’une telle obligation légale serait en toute vraisemblance contestée devant les tribunaux en vertu de la Charte des droits et libertés de la personne2.
Malgré la position du gouvernement provincial, dans certaines circonstances, une telle obligation de porter un masque peut être imposée aux Québécois, notamment dans le cadre de leur travail. En effet, en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail (« LSST »)3, un employeur a l’obligation de protéger la santé et d’assurer la sécurité et l’intégrité physique de ses travailleurs, et doit prendre toutes les mesures nécessaires pour y parvenir. Parallèlement, chaque travailleuse ou travailleur a l’obligation de prendre les mesures nécessaires pour protéger sa santé, sa sécurité ou son intégrité physique, et de veiller à ne pas mettre en danger la santé, la sécurité ou l’intégrité physique des autres personnes qui se trouvent sur les lieux de travail4. Par conséquent, pour se conformer à ces obligations, plusieurs employeurs ont imposé à leurs employés de porter le masque dans le cadre de leur travail.
Le transport aérien est un autre secteur d’activités où le port du masque est maintenant imposé. En effet, depuis le 20 avril dernier, pour tous les vols au départ ou à destination d’un aéroport canadien, les transporteurs aériens exigent que les voyageurs montrent qu’ils ont un masque non médical ou un couvre-visage au moment de l’embarquement.
Il est fort probable que le port du masque devienne obligatoire pour accéder à certains commerces, comme c’est le cas présentement dans les magasins Costco aux États-Unis. Cette mesure est aussi récemment apparue lors de la réouverture des salons de coiffure et les cliniques de professionnels de la santé.
Avec la réouverture des restaurants, le masque devra aussi être porté par les cuisiniers et les serveurs, lorsque la distanciation de deux (2) mètres ne pourra être respectée dans le cadre de leurs tâches au travail, et ce, en l’absence de barrière physique5.
Cette obligation de porter le masque est désormais obligatoire dans les transports en commun de certaines villes canadiennes, notamment à Toronto.
À ce stade-ci de la crise sanitaire, à la lumière de ces récents développements et suivant le déconfinement de plusieurs secteurs d’activités, il est probable que le gouvernement provincial décide, à son tour, d’imposer le port du masque dans certaines circonstances, et ce, afin de contrer ou, à tout le moins, limiter les effets de la seconde vague attendue cet automne.
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1 R.L.R.Q., chapitre S-2.2.
2 R.L.R.Q., chapitre C-12.
3 R.L.R.Q., chapitre S-2.1, article 51.
4 LSST, article 49.
5 Voir le « Guide de normes sanitaires en milieu de travail pour le secteur de la restauration », préparé par la CNESST