Méconnu, l’affacturage est offert par de plus en plus d’institutions financières canadiennes. Il consiste en la vente par une entreprise de ses comptes à recevoir à une institution financière qui se chargera par la suite de collecter les sommes dues directement auprès de l’acheteur. L’affacturage offre de nombreux avantages, y incluant l’augmentation des liquidités de l’entreprise.
Pourtant très populaire en Europe, l’affacturage, ou le financement de comptes à recevoir, a longtemps été erronément perçu au Québec comme une méthode de financement de dernier recours pour les entreprises en difficultés financières. Or, l’affacturage est aujourd’hui perçu comme un outil de relance économique et est offert par de plus en plus d’institutions financières. Il s’agit d’une opération complémentaire aux autres moyens de financement existants, pouvant même remplacer une marge de crédit. L’affacturage permet à une entreprise de monétiser rapidement ses divers comptes clients et donc d’optimiser son fonds de roulement.
En quoi consiste l’affacturage?
L’affacturage est un mode de financement à court terme selon lequel une entreprise vend ses comptes à recevoir à une entreprise financière appelée le « Facteur », qui s’occupera par la suite de la collection des créances et qui en assumera généralement les risques1. Au Québec, le Facteur acquiert la pleine propriété de la créance et l’affacturage emporte une véritable cession de créance2.
Le processus d’une opération d’affacturage est le suivant :
1) l’entreprise (le « Vendeur ») conclut un contrat de vente de biens ou de services avec son client (l’« Acheteur ») à qui il expédie les biens ou fournit les services;
2) le Vendeur transmet sa facture à l’Acheteur;
3) aux termes d’une convention d’affacturage, le Vendeur cède sa créance au Facteur qui paie le montant de la facture immédiatement au Vendeur, moins un pourcentage déterminé (variant généralement entre 5% et 15% et correspondant aux frais administratifs et d’assurance); et
4) à l’échéance de la facture cédée, l’Acheteur paie la somme directement au Facteur.
Organigramme de la relation tripartite entre les acteurs de l’affacturage
Comme mentionné, l’opération juridique de l’affacturage découle de la cession de créance et est donc régie par les articles 1637 et suivants du Code civil du Québec (« C.c.Q. »). Bien qu’au Québec le consentement de l’Acheteur ne soit pas requis comme condition de formation, la cession doit lui être notifiée afin de lui être opposable3. La convention d’affacturage prévoit généralement que le Vendeur donnera avis de la cession à l’Acheteur en lui transmettant un avis de cession de créance et en apposant une inscription sur ses factures indiquant que la créance visée a été cédée au Facteur et que tout paiement devra être effectué auprès de celui-ci et non auprès du Vendeur. Afin que la cession soit opposable aux tiers, notamment au syndic en cas de faillite, la cession d’une universalité de créances, actuelles et futures, devra être publiée au Registre des droits personnels et réels mobiliers4.
Comme le Facteur assume généralement les risques liés au recouvrement de la créance, il importe que celui-ci effectue une analyse détaillée de la condition financière du Vendeur ainsi que de la créance, y incluant tout document pouvant s’y rapporter comme le contrat, le bon de commande, la facture, le bon de livraison, les documents de transport et les incoterms applicables. Cette analyse est effectuée afin de s’assurer que la créance qui sera cédée est certaine, liquide et exigible pour limiter le plus possible les risques de compensation et de non-paiement par l’Acheteur. Afin de mitiger son risque de non-recouvrement d’une créance auprès d’un Acheteur, notamment en cas de faillite ou d’insolvabilité, le Facteur aura généralement recours à l’assurance-crédit.
L’affacturage peut être déconsolidant et ainsi permettre à une entreprise d’obtenir des liquidités additionnelles tout en améliorant la présentation de ses états financiers. L’affacturage réduit les délais de perception de comptes à recevoir et optimise ainsi le fonds de roulement de l’entreprise. Il est particulièrement intéressant pour les entreprises dont les activités sont saisonnières, car il permet de réduire les fluctuations importantes de liquidités entre les saisons.
Enfin, l’affacturage peut être offert sous différentes formes ou variations. Notamment, la collection auprès de l’Acheteur peut être « invisible » c’est-à-dire que le Vendeur continuera de collecter les recevables auprès de l’Acheteur. Dans ce cas, les paiements seront versés dans un compte bloqué au nom du Vendeur mais appartenant au Facteur. Également, certaines institutions offrent l’« affacturage inversé » suivant lequel le Facteur paiera directement le fournisseur d’un client, qui remboursera par la suite le Facteur conformément à un billet à ordre émis par le client en faveur du Facteur.
L’affacturage est un outil de financement qui est de plus en plus utilisé par les entreprises québécoises en raison de ses différents avantages. Il importe toutefois de se renseigner auprès de vos conseillers financiers afin d’analyser votre situation et déterminer s’il s’agit de l’outil de financement le plus adapté à votre réalité.
Pour toute question relative à l’affacturage, n’hésitez pas à communiquer avec nos professionnels ici ou avec les autrices du présent billet.
Me Pascale De Meyer, avocate
pascale.demeyer@steinmonast.ca
418-476-3621
Me Anaïs Welsh, avocate
anais.welsh@steinmonast.ca
418-640-4432
1 LLUELLES Didier et Benoît MOORE, Droit des obligations, La cession de créance, 3e édition, 2018, par. 3158.
2 JOBIN Pierre-Gabriel et Nathalie VÉZINA, Les obligations, La cession de créance, 7e édition, 2013, par. 944.
3 Article 1641 C.c.Q.
4 Article 1642 C.c.Q.