Immobilier résidentiel : interdiction aux non-Canadiens

16 février 2023

Immobilier résidentiel : interdiction aux non-Canadiens1

La Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens (la « Loi »), complétée par le Règlement sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens (le « Règlement »), est entrée en vigueur le 1er janvier 20232 et interdit aux non-Canadiens d’acheter des immeubles résidentiels situés au Canada3. Applicable du 1er janvier 2023 au 31 décembre 2024, cette mesure vise notamment à répondre à des préoccupations relatives à l’abordabilité des logements.

Pour bien circonscrire la portée de la prohibition, il importe de définir les principaux termes sur lesquels repose la Loi, soit les notions de « non-Canadien » et d’« immeuble résidentiel ».

Tel qu’indiqué dans son titre, la Loi s’applique aux « non-Canadiens », soit, tel que défini à l’article 2 de la Loi :

  1. un individu autre qu’un citoyen canadien, qu’une personne inscrite à titre d’Indien sous le régime de la Loi sur les Indiens ou qu’un résident permanent;
  1. une société, une personne ou une entité constituée autrement que par une loi fédérale ou provinciale;
  1. une société dont les actions ne sont pas cotées à une bourse de valeurs désignée par l’article 262 de la Loi de l’impôt sur le revenu, une personne ou une entité constituée par une loi fédérale ou provinciale et contrôlée par un individu, une société, une personne ou une entité mentionnés aux paragraphes 1 et 2. Il est à noter que le Règlement précise que la détention de 3 % des droits de vote d’une société, d’une personne ou d’une entité est suffisante pour en avoir le contrôle.

Un « immeuble résidentiel » est quant à lui défini comme étant un immeuble situé dans une région du Canada et faisant partie d’une agglomération de recensement ou d’une région métropolitaine de recensement, qui est soit4 :

  1. une maison individuelle ou un bâtiment similaire comprenant au plus trois logements;
  1. une partie de bâtiment qui constitue une maison jumelée ou en rangée, un logement en copropriété ou un local semblable; ou
  1. un terrain zoné pour usage résidentiel ou mixte qui ne contient pas de logement habitable.

La Loi interdit donc aux non-Canadiens d’acheter un immeuble résidentiel; cette interdiction comporte toutefois quelques tempéraments. En effet, un non-Canadien peut tout de même acquérir un immeuble résidentiel par décès, divorce, séparation, don ou par un transfert effectué selon les modalités d’une fiducie constituée avant l’entrée en vigueur de la Loi.

Certaines exceptions sont également prévues, par exemple, en ce qui concerne les résidents temporaires inscrits à un programme d’études autorisées ou titulaires d’un permis de travail. Ces derniers doivent toutefois respecter certaines conditions indiquées au Règlement pour être en mesure d’acquérir un immeuble résidentiel5. De plus, dans certains cas, il est possible pour un non-Canadien d’acquérir un immeuble résidentiel avec son conjoint, notamment si celui-ci n’est pas un non-Canadien.

Tout conseil ou encouragement, de même que toute incitation ou aide en vue de permettre à un non-Canadien d’acheter un immeuble résidentiel rend son auteur passible d’une amende pouvant aller jusqu’à 10 000 $6. Dans le cas d’une société, la responsabilité de ses dirigeants, ses administrateurs et ses cadres peut être engagée à ce titre7.

Par ailleurs, il appert qu’une vente d’un immeuble résidentiel conclue en contravention des dispositions de la Loi demeure valide8. Une ordonnance peut toutefois être rendue, sur demande du ministre, afin d’obliger la vente de cet immeuble, à condition que le non-Canadien en soit toujours propriétaire lorsque l’ordonnance est rendue9.

Il est à noter qu’à la suite d’un jugement déclaratoire rendu le 31 janvier 202310, le Tribunal a déclaré que l’interdiction d’achat d’un Immeuble résidentiel par un non-Canadien ne s’applique pas à une vente résultant d’une promesse d’achat conclue avant le 1er janvier 2023. Toutefois, il nous faudra attendre l’expiration du délai d’appel pour être certains que ce jugement est bel et bien applicable.

En définitive, d’ici le 1er janvier 2025, les personnes ou sociétés désirant vendre ou acheter un immeuble résidentiel au Canada devront demeurer vigilantes et s’assurer que la transaction projetée ne contrevient pas à la Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens.

Pour toute question, vous pouvez communiquer avec un membre de notre équipe en droit immobilier ici, ou encore avec les auteurs du présent billet :

Me Daphné Cloutier, notaire
daphne.cloutier@steinmonast.ca
418 640-4412

Me Daniel Morin, notaire et associé
daniel.morin@steinmonast.ca
418 640-4444


Les auteurs remercient Sarah Campeau-Lortie, stagiaire en droit, pour sa collaboration au présent billet.
2 Règlement sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, DORS/2022-250, (2022) Gaz Can II, 4776, art. 10.
3 Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, LC 2022, c. 10, art. 4(1).
4 Id., art. 2.
5 Règlement sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, préc., note 2, art. 5.
6 Loi sur l’interdiction d’achat d’immeubles résidentiels par des non-Canadiens, préc., note 3, art. 6(1).
7 Id., art. 6(2).
8 Id., art. 5.
9 Id., art. 7.
10 9357-4010 Québec inc. c. Yi-Fang Tai (31 janvier 2023), Montréal 500-17-123410-220 (QCCS).

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