Le fait qu’un huissier se présente à votre porte pour vous signifier une demande introductive d’instance (ci-après « Demande ») peut surprendre. Or, pour éviter qu’un jugement par défaut soit rendu contre vous, il faut y répondre dans les délais imposés par la loi.
Qu’est-ce qu’une demande introductive d’instance ?
La Demande est « un acte par lequel la partie demanderesse saisit une juridiction de ses prétentions »1. Ainsi, il ne s’agit pas d’une lettre de mise en demeure, mais bien d’une poursuite officielle devant les tribunaux. Afin de distinguer les deux concepts, nous vous invitons à consulter l’article publié par Me Caroline Tardif ici.
La Demande est présentée au tribunal au moyen d’un écrit de la partie demanderesse ou, selon le cas, de son avocat. Elle indique, en plus du nom des parties, leur adresse2. La Demande contient également un énoncé des faits, indique ce qui est reproché à la partie défenderesse et précise les conclusions recherchées, c’est-à-dire ce que la partie demanderesse souhaite obtenir.
Un avis d’assignation, obligatoirement joint à la Demande, indique quelles sont les pièces à son soutien et informe la partie défenderesse que ces pièces sont disponibles sur demande3. De plus, cet avis indique que les parties devront coopérer pour préparer un document intitulé « protocole » qui régira le déroulement de l’instance. Finalement, y est indiqué la sanction à laquelle la partie défenderesse s’expose si elle fait défaut de transmettre sa réponse à la Demande dans les quinze (15) jours de sa signification4.
En quoi consiste la réponse ?
Tel que mentionné, la partie défenderesse dispose de quinze (15) jours pour répondre à la Demande sous peine d’être condamnée par défaut et être tenue d’acquitter les frais de justice. Précisons toutefois que ce délai peut être prorogé par le tribunal s’il l’estime nécessaire puisqu’il ne s’agit pas d’un délai dit de rigueur5.
La réponse est un document simple qui doit indiquer l’intention de la partie défenderesse :
(i) de convenir d’un règlement à l’amiable;
(ii) de proposer une médiation; ou
(ii) de contester la Demande et d’établir avec la partie demanderesse un protocole de l’instance6.
La partie défenderesse doit également indiquer le nom et les coordonnées de son avocat, ou ses coordonnées personnelles si elle n’est pas représentée7.
Finalement, la réponse doit être notifiée à la partie demanderesse ou à son avocat, le cas échéant. La réponse doit ensuite être produite au greffe du tribunal dont les coordonnées sont indiquées à l’avis d’assignation8.
Qu’advient-il si je fais défaut de notifier la réponse ?
Si la partie défenderesse omet de déposer sa réponse dans le délai requis par la loi, un jugement par défaut risque d’être rendu contre elle si une inscription pour jugement est demandée par la partie demanderesse9. Un tel jugement statue sur le fond de la Demande selon les conclusions recherchées10.
Pour obtenir un tel jugement, la partie demanderesse doit déposer au greffe les pièces, une déclaration sous serment en plus de la preuve de signification de la Demande, après quoi le dossier pourra être valablement inscrit pour jugement11.
Une fois le dossier inscrit, le greffier spécial ou le juge peut rendre jugement sans enquête, et donc rapidement, si la Demande a pour seul objet le prix d’un contrat de service, la vente d’un bien meuble ou si elle concerne le paiement d’une somme d’argent dont le montant est clairement établi12. Pour tout autre type de Demande, le greffier spécial devra procéder à une enquête, de sorte que le jugement risque d’être rendu dans un délai plus long.
Si un jugement a été rendu par défaut contre vous, vous disposez alors de trente (30) jours suivant la signification du jugement pour présenter au tribunal une demande en rétractation de jugement. Vous devrez alors expliquer pourquoi vous n’avez pas répondu à l’assignation, que ce soit par fraude, évidente mauvaise foi, par surprise ou par tout autre cause jugée suffisante par le tribunal13.
Pour toute question relative à l’une ou l’autre de ces étapes ou en cas de réception d’une Demande, nous vous invitons à communiquer avec notre équipe de litige civil et commercial ici ou encore avec les auteurs du présent article.
Me Alexandre Manègre, associé
alexandre.manegre@steinmonast.ca
418-640-4420
Me Marianne Lamontagne, avocate marianne.lamontagne@steinmonast.ca
418-649-4013
1 Hubert, REID, Dictionnaire de droit québécois et canadien, 5e édition, Montréal, Wilson et Lafleur, 2015, p. 198;
2 Denis, FERLAND, Benoît EMERY, Précis de procédure civile, 6e édition, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2020, p. 500 et Code de procédure civile, art. 100
3 Ibid., p. 534 et Code de procédure civile, art. 145 al. 1;
4 Ibid., p. 534 et Code de procédure civile, art. 146, al. 3 et 147;
5 Ibid., p. 535 et Code de procédure civile, art. 84, 145 al.2, 180 et 339;
6 Ibid., p. 536;
7 Ibid., p. 536 et Code de procédure civile, art. 147 al. 1;
8 Ibid., p. 536 et Code de procédure civile, art. 147 al. 2;
9 Ibid., p. 643 et Code de procédure civile, art. 145 al. 2 et 147;
10 Op cit., REID note 1, p. 366;
11 Op cit., FERLAND et EMERY note 2, p. 643 et Code de procédure civile, art. 105, 106, 175 la.2 et 250 al. 2;
12 Ibid., p. 645;
13 Op cit., FERLAND et EMERY note 2, p. 40 et Code de procédure civile, art. 347;